Pourquoi, dans les Grisons plus que n’importe où ailleurs, les randonneurs doivent-ils faire beaucoup plus d’efforts pour parcourir un itinéraire dans les temps indiqués? Comment le temps de marche est-il calculé? Qui a «inventé» la randonnée? Tout sur la randonnée en 10 questions/réponses.
L’esprit de clocher des cantons a longtemps été présent sur les sentiers pédestres. Les diverses sections cantonales de tourisme pédestre calculaient différemment les vitesses de marche. S’ajoutait au calcul un «temps de réserve», afin de s’assurer que tous les randonneurs et toutes les randonneuses puissent arriver à temps pour prendre la dernière télécabine ou le dernier car postal. D’autres associations se basaient, quant à elles, sur le temps de marche moyen de plusieurs randonneurs et randonneuses sur un parcours donné. Dans les Grisons, on envoyait souvent sur les sentiers des grimpeurs chevronnés et très sportifs. Ils étaient alors «les plus rapides» et jouissent aujourd’hui encore de cette réputation.
Aujourd’hui, le temps de marche est calculé à l’aide d’une formule mathématique complexe, empreinte d’une perfection toute helvétique, qui prend en compte la distance horizontale, le dénivelé et la pente. Depuis 2006, cette dernière est utilisée de manière standardisée en Suisse. D’ici 2026, toutes les indications de temps seront basées sur ce calcul, assure Patricia Cornali, porte-parole de l’association Suisse Rando.
Nous devons les chemins de randonnée à un enseignant de Suisse orientale agacé de devoir traverser un nuage de gaz d’échappement alors qu’il effectuait une randonnée avec ses élèves à travers le col du Klausen. Il a décidé de signaliser les plus beaux itinéraires de randonnée, une initiative qui a donné naissance en 1934 à la Fédération suisse de tourisme pédestre (Suisse Rando) et aux 26 associations cantonales de tourisme pédestre. Ces organisations se sont accordées sur une signalisation des chemins de randonnée uniformisée au niveau national: les panneaux jaunes que l’on connaît aujourd’hui et qui indiquent aux randonneurs le chemin à suivre par monts et par vaux. Enthousiasmés, les responsables des organisations sont partis à la recherche d’itinéraires de randonnée accessibles dans leur cantons respectifs et à les baliser. Les panneaux ont toutefois dû être démontés durant la Seconde Guerre mondiale afin de ne pas aider un envahisseur potentiel à s’orienter.
65 000 kilomètres! Les parcourir dans leur totalité reviendrait à faire une fois et demie le tour de la Terre. À titre de comparaison, il y a en Suisse 71 400 kilomètres de routes et 5 100 kilomètres de voies ferrées. 64 pour cent des chemins sont des chemins de randonnée (panneaux jaune), 35 pour cent des chemins de randonnée de montagne (blanc-rouge-blanc) et 1 pour cent des chemins de randonnée alpine (blanc-bleu-blanc). Environ 50 000 panneaux indiquent ainsi aux randonneurs la catégorie de chemin, la destination et, souvent, la durée de marche. Si on y ajoute toutes les autres balises (panneaux en métal sans indication de la durée de marche, marquages à la peinture et autocollants), la Suisse compte 250 000 balises au total. (Poursuivez votre lecture ci-dessous...)
La couleur des panneaux indicateurs n’a pas été choisie au hasard. Le jour de la fondation de la Fédération suisse de tourisme pédestre, on a opté pour a) des panneaux indicateurs de type uniforme et b) de couleur jaune. La raison du choix de la couleur jaune n’est pas vraiment claire, mais la bonne visibilité de cette couleur a certainement joué un rôle. Depuis 2006, un jaune uniforme guide les randonneurs et randonneuses dans tout le pays: le jaune RAL 1007. La police de caractères utilisée est l’Astra-Frutiger, une police fine et élégante prescrite pour les panneaux de signalisation en Suisse. L’abréviation des heures sur les panneaux est le h pour toutes les langues, une abréviation concise et internationale.
Les panneaux doivent résister à bien des épreuves. Ils sont exposés au soleil, au vent et à la neige. «Et il n’est pas rare qu’on leur tire dessus», déclare Daniel Steudler, responsable du service Sentiers pédestres au sein de l’entreprise Sommerhalder smartgrafik à Thoune. Il ignore toutefois si les tireurs étaient sobres. Les panneaux qui n’ont pas été perforés par des tirs durent facilement 20 à 30 ans.
Presque tous les panneaux sont en aluminium. Le texte est ensuite imprimé sur la plaque avant qu’un vernis de protection ne soit appliqué. Presque tous? Les panneaux des Grisons sont différents. Ils sont moulés en relief, ce qui les rend particulièrement résistants. L’écriture se démarque alors très bien du fond. Quand la couleur du texte s’estompe, il suffit de vernir à nouveau les caractères, c’est tout! Selon Stephan Kaufmann, directeur de l’Association des sentiers pédestre des Grisons, ces panneaux sont presque devenus cultes, ayant survécu tant à la sérigraphie qu’à l’impression numérique.
Oui, la voici: compter 15 minutes par kilomètre de chemin plus 15 minutes par 100 mètres de dénivelé positif. En descente, il faut ajouter 15 minutes par 200 mètres de dénivelé. Un randonneur mettra donc 2h45 pour parcourir 10 km avec 100 mètres de dénivelé positif.
On estime à environ 50 millions de francs par an les coûts liés à la rénovation et à l’entretien des chemins de randonnée suisses. L’entretien d’un kilomètre de chemin coûte en moyenne 800 francs par an. De leur côté, les randonneurs dépensent environ 2,3 milliards de francs par an en Suisse. Cette somme comprend les frais liés au transport, au logement et à la restauration, auxquels s’ajoutent les dépenses liées à l’achat de cartes et d’équipement de randonnée.
Depuis 1979, suite à une votation populaire, les chemins de randonnée pédestre sont inscrits dans la Constitution fédérale et constituent de ce fait une tâche étatique. Il s’agit d’un cas unique au monde. La loi fédérale sur les chemins pour piétons et les chemins de randonnée pédestre a été rédigée sur la base de l’article de la Constitution fédérale et est entrée en vigueur en 1987. Depuis, les chemins pour piétons et les chemins de randonnée pédestre sont protégés en Suisse et il est interdit de les goudronner ou de les bétonner.
Source: Suisse Rando