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Vivre plus sainement?

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Charge mentale: les femmes sont particulièrement concernées

Pour bien organiser le quotidien de la famille, il faut penser à mille petites choses, ce qui demande parfois presque autant d’énergie que l’action elle-même. Une psychologue nous explique comment mieux gérer la charge mentale.

Votre fille a besoin de nouvelles chaussures, votre fils d’aller chez la dentiste et vous devez leur rappeler de faire leurs exercices de piano. Il faut aussi penser à l’anniversaire de grand-maman et trouver un appartement pour les vacances d’été. Afin que la vie de famille se déroule sans accroc, il est indispensable de déployer des talents d’organisation. Dans le schéma familial traditionnel, ce sont les femmes qui assument la plus grande partie de ce travail de réflexion. Elles sont souvent à bout de forces. Depuis quelques années, le terme «charge mentale» est devenu courant dans les pays francophones.

Quelle est sa signification?

Quelle est la différence entre charge mentale et surcharge mentale?

Comme le passage est progressif entre la charge ressentie et la surcharge, on ne peut pas séparer ces deux notions de manière distincte. En cas d’apparition de symptômes néfastes pour la santé, on parle clairement de surcharge mentale. Cependant, dans la littérature médicale, on parle uniquement de charge mentale.

Il s’agit d’une traduction de l’anglais «Mental load». Plus que du temps et de l’énergie, c’est le processus de réflexion nécessaire pour accomplir les tâches. Dans un quotidien complexe, il faut systématiquement penser à tout et s’organiser pour assurer une coordination sans faille et un timing parfait, sans rien oublier. Le terme de charge mentale s’emploie surtout dans le contexte familial et ce sont souvent les mères qui la supportent.

Pourquoi le simple fait de devoir prévoir et organiser est-il aussi stressant?

Lorsqu’on a un tas de choses en tête, même s’il s’agit surtout de banalités, il est souvent difficile de se concentrer sur son travail ou de se déconnecter suffisamment pour se reposer pendant son temps libre. Il peut arriver qu’on se réveille la nuit et qu’on ne puisse plus se rendormir à la pensée soudaine d’une tâche à accomplir ou d’une chose oubliée. De plus, comme le travail de réflexion du quotidien ne se voit pas, il n’est souvent pas valorisé. 

Quels peuvent être les symptômes de la charge mentale?

À long terme et faute de repos suffisant, la charge mentale peut augmenter le niveau de stress au point d’entraîner de vrais problèmes de santé: irritabilité, troubles du sommeil, ruminations, palpitations cardiaques ou tensions, pouvant conduire à une dépression. Ces perturbations sont également susceptibles de mettre à mal les relations au sein et en dehors de la famille. «En cas de troubles du sommeil persistants ou de sentiment de surmenage, mieux vaut demander de l’aide», conseille Claudia Meier Magistretti, psychologue et psychothérapeute en formation chez WePractice, à Berne.

Les femmes sont-elles plus sujettes à la charge mentale que les hommes?

Oui, surtout si elles ont des enfants. Dans un sondage  réalisé en 2021 par l’institut Sotomo, à la demande du magazine Annabelle, 81% des femmes interrogées ont déclaré en faire beaucoup plus que leur partenaire concernant l’organisation générale du ménage et le fait «de ne rien oublier». D’après ce qu’elles ressentent, les femmes au foyer assument également plus de responsabilités dans l’entretien des relations avec la famille, le cercle amical et le voisinage, la garde des enfants et leur éducation, ainsi que dans la planification des vacances et des loisirs. En revanche, leurs partenaires contribuent davantage aux revenus financiers et s’occupent des réparations à la maison. La majorité des couples exprime une volonté égalitaire lors de la première grossesse. Mais d’après la recherche, seule une minorité parvient à mettre ces valeurs en pratique en tant que famille.

(Voir suite ci-dessous...)

Les femmes se mettent-elles la pression toutes seules?

Elles entendent souvent ce reproche: «Tu es trop perfectionniste! Tu veux toujours tout faire! Tu ne sais pas lâcher prise!» ... et ainsi de suite. Il est difficile de savoir si ces reproches sont justifiés et cela dépend de la situation. Les femmes ont la réputation d’être très exigeantes vis-à-vis d’elles-mêmes et de la famille. Et donc d’avoir du mal à se décharger d’une tâche sans vérifier constamment qu’elle est parfaitement exécutée. Si le papa se contente de réchauffer des raviolis au lieu de préparer un repas équilibré, cela ne leur suffira pas. D’un autre côté, les femmes sont également plus surveillées par la société et leurs faiblesses plus volontiers montrées du doigt. Si un enfant ne fait pas ses devoirs ou si son goûter n’est pas équilibré, c’est plutôt la mère qui sera en tenue pour responsable. C’est plutôt elle, également, qui aura honte de son manquement.

Les hommes peuvent-ils aussi souffrir de charge mentale?

Oui, bien sûr. Il est toutefois exceptionnel que les hommes assument la plus grande partie du travail d’organisation et de réflexion dans la famille. Mais un travail exigeant conjugué à une fonction bénévole telle que conseiller municipal, pompier volontaire ou entraîneur de football implique non seulement d’investir beaucoup de temps, mais aussi de faire preuve d’organisation pour ne rien oublier. «Les pères qui exercent des fonctions flexibles, qui occupent des postes à responsabilité ou qui travaillent dans des conditions difficiles, par exemple par roulement, sont également concernés par la charge mentale», explique Claudia Meier Magistretti. De plus, lorsqu’ils souhaitent réduire leur temps de travail ne serait-ce que de 10%, les hommes sont encore regardés d’un drôle d’air et leurs ambitions remises en question. Le préjudice de carrière lié au travail à temps partiel est plus important pour les hommes que pour les femmes.

Dans quelle mesure les familles monoparentales sont-elles touchées?

Là aussi, la pression est inégale et reflète la répartition des rôles familiaux ancrée dans l’inconscient collectif. Cela dit, la charge mentale s’exerce avec une force encore accrue sur les mères et les pères célibataires. En plus des milliers de choses auxquelles ils et elles doivent penser au quotidien, il leur faut planifier la garde des enfants et se mettre d’accord avec l’ex-partenaire. Ce qui s’accompagne souvent d’une charge émotionnelle, en particulier au moment de la séparation. En outre, le stress des parents célibataires est souvent aggravé par le manque de temps et les difficultés financières, ce qui les rend plus fragiles psychologiquement que les personnes dont la relation est stable.

Quelles sont les dimensions sociales de ce problème?

«La charge mentale est souvent vécue comme un problème, voire un échec personnel», explique Claudia Meier Magistretti. Selon elle, il s’agit aussi d’une conséquence du manque d’offres de soutien et de structures pour les familles. Elle déplore l’insuffisance des bases légales et des réglementations sur le lieu de travail, en Suisse. Des jours de congé accordés aux parents, pour l’adaptation à la crèche par exemple, seraient un soulagement. «Les pays scandinaves montrent l’exemple», constate Claudia Meier Magistretti: «Avec des congés de maternité et de paternité beaucoup plus longs et la garantie de retrouver son emploi. De quoi démarrer un peu mieux dans la vie de famille.»

6 conseils pour mieux gérer la charge mentale

  • Communiquer: continuez de discuter avec votre partenaire. Racontez-vous ce que vous vivez au quotidien, ce que vous appréciez et ce qui vous pèse. Mais essayez d’éviter les reproches. Écoutez-vous attentivement et exprimez votre gratitude, par exemple en disant «Je vois ce que tu fais.
  • Négocier: définissez les choses qui sont importantes, celles qui sont secondaires et celles qui n’ont pas importance. Remettez en question vos habitudes, essayez de faire des concessions par rapport à l’idéal et détendez-vous. Si vous avez confié une tâche à d’autres membres de la famille, faites-leur confiance, même si vous auriez sans doute fait les choses autrement.
  • Faire des listes: notez dans votre agenda ou sur une liste toutes les tâches à accomplir, même les plus insignifiantes. Placez un carnet et un stylo près de votre lit pour pouvoir noter ce qui vous vient à l’esprit, même la nuit. Il sera alors plus facile de lâcher prise et de vous rendormir.
  • Adopter un calendrier familial: utilisez un calendrier commun pour faciliter la coordination des rendez-vous et des responsabilités. Répartissez également les tâches à effectuer. Notez le temps estimé, la fréquence, le délai et le nom de la personne chargée de s’en occuper. Incluez vos enfants en âge d’y participer. La personne responsable d’une tâche doit s’en acquitter entièrement, du début à la fin. Biffez ce qui a été fait, afin de bien voir ce qui est déjà derrière vous. Rebattez régulièrement les cartes et voyez ensemble si l’organisation est bonne.
  • Prendre du temps pour soi: oubliez un peu la famille, et levez un peu le pied. Rechargez vos batteries et satisfaites vos besoins personnels.
  • Prévoir du temps pour le couple: pour que votre relation ne soit pas négligée et puisse s’épanouir au sein de la famille, il lui faut de l’espace. Les couples devraient s’accorder des soirées ou des week-ends et, si possible, laisser les enfants aux grands-parents ou à des connaissances. Rien de tel pour prévenir les conflits et consolider la famille. On dit qu’il faut tout un village pour élever un enfant. Il n’est donc pas interdit de demander un peu d’aide de temps en temps.

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de Andrea Söldi,

publié le 18.11.2024


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