Lorsque le pantalon serre le ventre, les bonnes résolutions incitent à se lancer tête baissée dans un régime. Mais maintenir un poids constant durablement est une autre histoire. David Fäh, nutritionniste, explique pourquoi les kilos reviennent aussi vite qu’ils sont perdus et comment éviter l’effet yo-yo.
Le terme a été repris en référence au mouvement d’un yo-yo, allant de son point le plus bas à une remontée rapide vers un point plus haut. Le phénomène se produit souvent lors d’un régime: on se lance avec une grande motivation dans un changement prometteur de son alimentation et on exulte lorsque la balance affiche assez rapidement quelques kilos en moins. Mais souvent, la perte de poids est relativement éphémère et ne se maintient pas. À l’issue d’un régime spécifique, la reprise de poids est rapide, et dépasse parfois ce qu’on avait perdu. Comme le montrent des études (p. ex. l’étude moldave de 2020), 80% des personnes qui ont réussi à réduire leur poids d’au moins 10% sont revenues à leur poids antérieur en l’espace d’un an. En cinq ans, ce chiffre est passé à 95%.
(Voir suite ci-dessous...)
Plusieurs facteurs l’expliquent. Ils sont en partie déterminés par l’évolution et inscrits dans la génétique. «Si nous mangeons moins de calories que ce dont nous avons besoin pour maintenir notre poids, notre corps tire la sonnette d’alarme», explique le Dr David Fäh, expert en nutrition à la Haute école spécialisée bernoise. «Le métabolisme augmente son efficacité pour ne rien gaspiller et la production de chaleur diminue.» Ce mode d’économie aurait permis la survie de nos ancêtres lorsque les chasseurs rentraient à plusieurs reprises sans butin ou que la récolte était maigre. Ce mécanisme est toutefois préjudiciable aux personnes souhaitant perdre du poids à l'ère des magasins et des réfrigérateurs pleins à craquer. En effet, lorsqu’on termine un régime, le corps a besoin de moins de calories qu’auparavant. En revenant à son alimentation habituelle, on reprend automatiquement du poids.
Qui plus est, notre nature nous incite à constituer des réserves pour les périodes «sans». En effet, autrefois, l’abondance était tout au plus temporaire et ne posait donc jamais de problème, notamment parce que les gens ne vivaient pas assez longtemps pour développer un diabète ou des maladies cardio-vasculaires. Contrairement à la perte de poids, l’organisme n’a donc pas développé de régulation inverse lors de la prise de poids. Une fois qu’il a fait l’expérience de la pénurie de nourriture, le besoin de compenser est particulièrement fort, donc également après un régime.
(Voir suite ci-dessous...)
C’est le domaine couvert par l’épigénétique. Cette discipline s’intéresse aux marqueurs chimiques sur les cellules qui activent ou désactivent certaines expressions des gènes. Comme l’a montré une étude de l’EPFZ sur des souris publiée en 2024, les cellules adipeuses sont dotées d’une sorte de mémoire. Une fois qu’elles ont stocké un volume important de graisse, elles ont également tendance à en stocker davantage après un régime. L’effet a même pu être observé sur plusieurs générations: des études révèlent que les enfants et petits-enfants de personnes ayant connu des guerres et des famines ont une plus forte tendance à l’obésité, mais présentent aussi un risque plus élevé de schizophrénie, de dépression et de maladies cardio-vasculaires.
Un autre mécanisme défavorable est la perte de masse musculaire pendant un régime. Les personnes de plus de 55 ans sont particulièrement touchées par ce phénomène. «Avec une alimentation riche en protéines et un entraînement musculaire, on peut certes parvenir à perdre plus de graisse que de muscle», explique le nutritionniste. «On ne peut toutefois jamais bloquer totalement la fonte musculaire lors de la perte de poids.» Et comme une masse musculaire réduite diminue automatiquement le métabolisme de base, il faut réduire les calories après avoir perdu du poids pour le maintenir.
Il n’y a malheureusement pas de remède contre les effets génétiques et épigénétiques. Nous ne pouvons rien faire contre le fait que nous avons naturellement tendance à faire des réserves d’énergie ou si nos parents ou grands-parents ont été victimes de la famine. Pourtant, il existe une parade face à la prise de poids constante. «Il n’y a pas d’autre solution que de modifier durablement ses habitudes alimentaires et son mode de vie», souligne David Fäh. Il faut éviter les objectifs irréalistes. «On doit viser un poids que l’on peut maintenir à long terme.» En effet, comme le révèlent des études récentes, un léger surpoids n’a pas d’effet négatif sur la santé et l’espérance de vie si l’on pratique en même temps une activité physique. Ce n'est qu’à partir d’un indice de masse corporelle (IMC) de 30 que le risque de mortalité augmente. Il est même déconseillé aux personnes de plus de 70 ans de suivre un régime.
(Voir suite ci-dessous...)
Pour un poids de 65 kilos, le corps consomme 1560 kilocalories par jour en position couchée. Pour le métabolisme global, il faut ajouter entre 500 et 800 calories selon le degré d’activité.
«Pour commencer à adopter une hygiène de vie plus saine, un régime peut être tout à fait indiqué», explique David Fäh. Mais l’expert déconseille un régime choc, dans lequel on consomme très peu de calories ou un régime zéro. La plupart du temps, ne pas descendre en dessous du métabolisme de base de l’organisme a un effet plus pérenne. Celui-ci comprend les besoins caloriques au repos absolu et s’élève généralement au poids corporel multiplié par 24.
Selon David Fäh, il faut également se méfier des miroirs aux alouettes, promettant une perte de poids trop belle pour être vraie et associée à des offres spéciales comme des comprimés, des poudres ou des substituts de repas. Les formes d’alimentation telles que
sont parfois peu équilibrées et peu compatibles avec la vie quotidienne et sociale, explique David Fäh: «Soumettre l’ensemble de notre mode de vie au diktat d’un régime est préjudiciable à notre comportement alimentaire.» Il va de soi qu’il est parfois nécessaire de se restreindre et de s’abstenir. «Mais on doit aussi pouvoir se faire plaisir sans penser constamment aux mauvaises calories.»